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Grands enjeux en santé numérique : focus sur l’exploitation des données, les algorithmes et la règlementation

avril 11, 2023 |

Fondée en 2017, le société TechToMed se donne pour mission d’accompagner les acteurs de la santé dans leur processus de transformation numérique. A l’origine d’événements de référence dans le domaine de la santé tels que Pharma HealthTech, DTx France ou plus récemment Health Social Data Day, TechToMed est devenu un acteur incontournable de la HealthTech. Membre du Conseil d’administration du Healthcare Data Institue, l’équipe de TechToMed nous dévoile les dernières tendances du secteur, avec un focus particulier sur les données de santé. Rencontre.

 

En tant que société de conseil, TechToMed se positionne à la croisée entre le monde de la santé et le monde du numérique. Quelles sont les grandes tendances que vous identifiez en ce moment dans le domaine de la HealthTech ? 

Dans le domaine de la HealthTech, nous identifions un réel ancrage du numérique au service du monde de la santé. L’utilisation de l’intelligence artificielle, du jumeau numérique, du cloud computing, de l’IoT ou des data se développe et se généralise à tous les niveaux. Cela s’explique par le vieillissement démographique qui se poursuit ainsi que l’augmentation des maladies chroniques.

Les laboratoires pharmaceutiques ne cessent d’investir dans ces nouvelles technologies pour améliorer la recherche, découvrir de nouvelles cibles, accélérer le développement de nouveaux médicaments, accéder au marché ou encore atteindre les patients. La santé évolue constamment avec le numérique et l’industrie pharmaceutique adapte son département de recherche et développement pour répondre aux nouvelles exigences et permettre de futurs succès.

De plus, la chimie et la biologie n’ont permis d’identifier qu’une petite partie des possibilités thérapeutiques. L’arrivée des données et de l’IA a ouvert un nouveau champ d’approches. Les algorithmes contribuent à la santé de demain en permettant une synthèse rapide des connaissances médicales empiriques et représentent une aide à la décision médicale et au diagnostic.

 

Vous travaillez souvent avec des acteurs de la santé sur leur stratégie d’utilisation des données de santé. Quelles sont les principales préoccupations que vous identifiez en ce moment ? 

Nous constatons que l’utilisation des données de santé est un sujet compliqué tant par la nature du sujet que par sa mise en pratique. Nos clients rencontrent des difficultés à définir leur stratégie d’utilisation. Les principales préoccupations concernent la cybersécurité, la règlementation ainsi que l’exploitation et le traitement des données.

Tout d’abord, la cybersécurité représente un problème majeur de santé. Les attaques envers les établissements de santé notamment ne cessent de croître et sont de plus en plus sophistiquées. Les acteurs doivent redoubler de vigilance et investir dans la sécurité des systèmes d’information, que ce soit en amont avec plus de prévention (audits de sécurité, sensibilisation…) mais également en aval avec une réponse aux attaques.

Ensuite, les données de santé sont considérées comme sensibles donc leur usage et leur durée de conservation sont très réglementés. La confidentialité des patients demeure un enjeu majeur et entraine une règlementation stricte. Un très haut niveau de sécurité et de protection doit être appliqué et les patients ne doivent pas être identifiés.

Enfin, ces données doivent être exploitables afin d’être collectées et traitées. Cela représente une autre préoccupation pour nos clients. En effet, les systèmes d’information, hospitaliers notamment, ne sont pas standardisés – même si cela évolue avec EHDEN par exemple – et ne permettent pas d’interopérabilité des données. Plusieurs critères de qualité tels que l’exhaustivité, l’accessibilité ou encore l’homogénéité demeurent des enjeux majeurs pour mettre en valeur les données existantes.

 

Vous êtes à l’origine de l’événement DTX France qui explore les différentes facettes des thérapies digitales sur le marché Français. Au lendemain de la signature d’un protocole d’accord pour la prise en charge de la télésurveillance médicale dans le droit commun, comment voyez-vous le développement de ce secteur ? 

En effet, le 4 juillet prochain, Techtomed organisera la deuxième édition de DTx France. Une journée dédiée aux thérapies digitales, ces nouvelles formes de thérapies qui investissent peu à peu le marché. Cette journée s’inscrit dans un contexte riche en actualités puisqu’un certain nombre d’annonces et de décrets ont été dévoilés ces derniers mois.

Parmi eux, il est impossible de ne pas mentionner le passage de la télésurveillance dans le droit commun. Deux décrets successifs, publiés fin décembre 2022, ont permis de placer la France comme leader européen dans le domaine en définissant la prise en charge et le remboursement des activités de télésurveillance médicale ainsi que le contenu de la déclaration des activités de télésurveillance médicale aux ARS. Après l’arrêt du programme ETAPES et la bascule vers le droit commun (programme de prise en charge de la télésurveillance à titre expérimental), il est donc officiel que cette dernière sera remboursée à partir du 1er juillet prochain. Rappelons que pour chaque patient, deux forfaits seront versés : l’un à l’opérateur de télésurveillance (professionnels de santé ou structures de soin) et un forfait technique, qui est versé à l’exploitant du dispositif médical.

Avec cette annonce, de nombreux acteurs de la télésurveillance espèrent tirer leur épingle du jeu. La question est maintenant de savoir si tous trouveront leur place sur le marché d’une part ; et à quelle hauteur de remboursement peuvent prétendre les exploitants d’autre part.

Quelques semaines plus tard, en mars 2023, était dévoilée la PECAN (Prise en Charge Anticipée) avec ses modalités de prise en charge des dispositifs médicaux numériques, dont les DTx font partie. Cette annonce, très attendue par tous les acteurs du secteur, a permis de clarifier les conditions d’accès à un remboursement provisoire. Pour rappel, la PECAN permet la prise en charge dérogatoire d’un an par l’Assurance Maladie des solutions suffisamment matures, qu’elles soient numériques ou non. Cette phase anticipée permet à l’exploitant de finaliser son parcours d’évaluation tout en bénéficiant d’un remboursement et d’usages en vie réelle.

Si certaines questions restent en suspens, notamment la hauteur des remboursements et la recevabilité des études cliniques réalisées à l’étranger, la HAS martèle qu’il ne faut pas perdre de temps et lancer les demandes de prise en charge dès à présent.

 

Vous lancez en septembre la première édition de Health Social Data Day, un événement dédié aux données de santé issues des réseaux sociaux, en partenariat avec Kap Code. Pourquoi avez-vous décidé de créé cet événement ?  

L’intelligence artificielle permet de collecter et analyser de grands volumes de données pour en extraire de nouvelles connaissances. Jusque récemment, les données étaient essentiellement collectées lors d’essais cliniques.

Aujourd’hui, les données de santé collectées « en vie réelle » représentent une nouvelle source de connaissances au service de la recherche et des patients. L’exploitation de ces données de vie réelle est un enjeu majeur de l’amélioration de notre système de soins et de la santé des populations.

Les données issues des réseaux sociaux ne cessent de croître avec l’usage majeur de ces derniers. Ces plateformes d’échanges ont pris une place prépondérante dans notre quotidien et sont utilisées par plus de 50% de la population mondiale. Elles amènent une vision plus précise de la réalité du soin à travers la voix spontanée des patients et des aidants. De nombreux utilisateurs (patients, aidants, professionnels de santé…) s’y expriment sur le vécu d’une pathologie et les traitements associés, sur le parcours de soins ou interrogent une communauté ciblée sur certains cas particuliers de maladie. Ces échanges peuvent également être annonciateurs de signaux faibles.

En outre, les technologies de traitement du langage et la réflexion scientifique autour de l’apport de ces données dans l’amélioration des parcours de soins ont atteint un réel niveau de maturité.

Nous avons ainsi décidé de créer cet évènement afin de dédier une journée à une meilleure compréhension de l’utilisation de ces données, leur intérêt et leurs enjeux. L’objectif est de sensibiliser l’ensemble des acteurs à cette approche innovante.

Pour ce faire, la journée démarrera par une présentation des données issues des réseaux sociaux pour bien définir le sujet avec une explication de l’exploitation de ces données puis sera ponctuée de thématiques opérationnelles telles que la désinformation ou la gestion de crise.

Nous souhaitons aborder plusieurs angles afin de donner une vision globale de l’apport pour la santé publique mais également des limites des données issues des réseaux sociaux. Nous ambitionnons de regrouper les KOL de recherche sur le sujet, les industriels pharmaceutiques, les autorités et évidemment les patients.

 

 

Propos recueillis auprès de l’équipe de TechToMed : Laura Bailet, Mathilde Pasko et Franck Le Meur